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jeudi 4 septembre 2014

La sobriété heureuse

La Sobriété Heureuse
Pierre Rabhi


Pierre Rabhi a  vingt ans à la fin des années cinquante, lorsqu'il décide de se soustraire, par un retour à la terre, à la civilisation hors sol qu'ont largement commencé à dessiner sous ses yeux ce que l'on nommera plus tard les Trente Glorieuses. Après avoir dans son enfance assisté en accéléré, dans le Sud algérien, au vertigineux basculement d'une pauvreté séculaire, mais laissant sa part à la vie, à une misère désespérante, il voit en France, aux champs comme à l'usine, l'homme s'aliéner au travail, à l'argent, invité à accepter une forme d'anéantissement personnel à seule fin que tourne la machine économique, point de dogme intangible. L'économie ? Ce n'est plus depuis longtemps qu'une pseudo-économie qui, au lieu de gérer et répartir les ressources communes à l'humanité en déployant une vision à long terme, s'est contentée, dans sa recherche de croissance illimitée, d'élever la prédation au rang de science. Le lien filial et viscéral avec la nature est rompu ; elle n'est plus qu'un gisement de ressources à exploiter - et à épuiser. Au fil des expériences de vie qui émaillent ce récit s'est imposée à Pierre Rabhi une évidence : seul le choix de la modération de nos besoins et désirs, le choix d'une sobriété libératrice et volontairement consentie, permettra de rompre avec cet ordre anthropophage appelé "mondialisation". Ainsi pourrons-nous remettre l'humain et la nature au cœur de nos préoccupations, et redonner, enfin, au monde légèreté et saveur.
Un des meilleurs livres que j'ai jamais lu... Le genre de livre qui fait réfléchir, qui a le pouvoir de faire changer le lecteur. Pierre Rabhi a une plume magnifique, on a envie de relire le livre une fois fini, et surtout on a envie de faire changer les choses comme lui le fait. Si vous ne connaissez pas cet auteur voici son blog. C'est un homme pour qui écrire ne suffit pas, ces phrases (on peut dire punchline à ce niveau) sont suivies par des actes. Il a crée le mouvement colibris. Bon je pourrais en parler des heures, mais je ne rajouterai rien de plus que ce que vous trouverez sur ces sites.
Voici donc quelques extraits de ce livre incroyable...

Je devais quant à moi comprendre bien plus tard qu'à ce forgeron, la modernité arrogante et totalitaire avait infligé, comme à d'innombrable être humains au Nord comme au Sud, une sorte d'oblitération par la négation de son identité et de sa personne. Pire encore : elle a réduit, sous prétexte de l'améliorer, la condition de tous à une forme moderne d'esclavage, non seulement en produisant du capital financier sans aucun souci d'équité, mais en instaurant, du simple fait de prendre l'argent comme mesure de la richesse, la pire inégalité planétaire qui soit.
Comment, pour tout dire, ne pas douter d'une civilisation qui a fait de la cravate le nœud coulant symbolique de la strangulation quotidienne ? Cet ornement ne serait-il pas en fait une laisse tenue par la fameuse main invisible, qui procure une sensation de libération lorsqu'elle est reléguée à la fin d'une journée dont elle a marqué la rigueur laborieuse ?
Mais le délit suprême imputable à cette pensée régressive est d'avoir livré la beauté, la majesté de la vie et de l'être humain lui-même à la vulgarité de la finance, et d'avoir instauré par son entremise un ordre universel dont ce que nous appelons la crise financière est l'un des effets ; comment ne pas être saisi d'une rage douloureuse à voir profaner la vie par l'ignorance ? C'est sous l'inspiration d'une rationalité sans âme que s'est construit le monde actuel. Il est comme dépoétisé, propice à l'ennui et au désabusement.
Bien éloigné de la réalité élémentaire, fondée sur la perpétuation de l'espèce, l'être humain est pris au piège de ces fantasmes. Il donne à des métaux ou à des pierreries une valeur symbolique exorbitante et en fait des objets d'enrichissement pour ceux qui en possèdent. Voyant déferler les hordes de conquérants européens en quête frénétique d'or, source de violences et de meurtres, certains Peaux-Rouges croyaient véritablement que ce métal rendait fou, et se gardaient bien d'y toucher pour ne pas être atteints par la démence qu'il provoque. Je suis souvent émerveillé par la puissante capacité qu'à la candeur à mettre en évidence des vérités profondes. Oui l'or a rendu l'humanité folle. Et c'est un crève-cœur que de constater le pouvoir subliminal de ce qui après tout n'est que du métal.
Ainsi, d'une utilisation des ressources aux fins d'assouvir des besoins légitimes, liés aux nécessités indispensables à l'existence, on est passé à une pulsion irrépressible de posséder. Faut-il rappeler que certaines civilisations, qui font les délices des archéologues qui en décryptent la mémoire pétrifiée, sont ensevelies sous le sable des déserts qu'elles ont provoqués ?
Faut-il encore et encore le redire ? on ne peut appliquer à une planète naturellement limitée un principe artificiel illimité. => dette écologique
Trêve d'hypocrisie : ce que tout le monde appelle "éducation" est une machine à fabriquer des soldats de la pseudo-économie, et non de futurs être humains accomplis, capables de penser, de critiquer, de créer, de maîtriser et de gérer leurs émotions, ainsi que ce que nous appelons spiritualité ; "éduquer" peut alors se résumer à déformer pour formater et rendre conforme.
La prépondérance donnée à l'intellect au détriment de l'intelligence des mains, auxquelles nous devons pourtant notre évolution, est une catastrophe qui fait de nous des infirmes sans que nous en ayons conscience.
L'initiation à la modération est source de joie, car elle rend plus accessible la satisfaction, abolissant la frustration que produit le toujours plus, entretenue en permanence par une publicité aux talents pernicieux, dont tous les enfants devraient être protégés. Cette prise en otage produit des enfants blasés, désabusés, et, avec le "tout, tout de suite", c'en est fini de ce désir auquel la patience donne tant de saveur et de valeur. Dans le même ordre d'idées, on constate que l'industrie du jouet participe à l'ingérence de l'adulte dans l'imaginaire de l'enfant. Saturé d'outils ludiques prêts à la consommation, celui-ci est détourné de cette capacité naturelle commune à tous les enfants du monde de créer par eux mêmes, et avec une fraîcheur incomparable, les objets nécessaires à leur amusement.
Il ne suffit pas de se demander : Quelle planète laisserons nous à nos enfants, il faut également se poser la question : Quels enfants laisseront nous à notre planète ?

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